Revue électronique de sociologie
Esprit critique
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Vol. 02 no. 11 - Novembre 2000
Editorial
 

Le suicide de l'État

par Jean-François Marcotte
 

      Ne faites pas confiance au discours en faveur de la baisse d'impôts. Ce discours prétend qu'il s'agit d'un geste dédié à aider la classe moyenne et les moins nantis à avoir un plus grand pouvoir d'achat. N'en croyez rien!

      D'abord, les personnes pauvres ne paient généralement pas d'impôts et une baisse d'impôts n'aurait aucun impact favorable. Au contraire, une baisse d'impôts annoncerait un manque à gagner dans le financement des services sociaux, et c'est précisément une amélioration des services sociaux qui serait nécessaire aux moins nantis pour se sortir de leur misère.

      Ensuite, on pense donner un plus grand pouvoir d'achat à la classe moyenne avec ces baisses d'impôts. En fait, par rapport au salaire et au pourcentage d'impôts, on ne redonne qu'un peu d'argent de poche aux contribuables de la classe moyenne. En pesant le pour et le contre, on observe que le citoyen de la classe moyenne perd beaucoup plus qu'il ne gagne dans cette transaction. D'une part, tout le monde sait que lorsque l'on rassemble des services administratifs par la mise en commun des ressources, on obtient des coûts moins élevés de gestion. Si l'on cesse de se mettre ensemble pour se payer des infrastructures nationales et des services sociaux, la facture globale ne peut être que plus cher en bout de compte. Pour donner une image limite, si l'on démantèle un service, comme par exemple le service de santé, et que l'on redonne l'argent aux contribuables, il est clair que tous perdront dans le coup par une hausse des frais de gestion de services privés éparpillés. Les quelques dollars reçus par les contribuables moins nantis ne seraient pas suffisants pour se payer une opération médicale dans un service privé en cas de problème de santé.

      Enfin, il est clair que 10% d'un petite somme rapporte peu au pauvre alors que sur une grosse somme, cela représente un montant beaucoup plus important. Alors, ce sont les mieux nantis qui profiteront directement de telles mesures. Rien à craindre pour une personne aisée financièrement puisqu'elle a toujours la marge financière nécessaire pour se payer un service privé à prix fort en cas de problème.

      Le privée fait la promotion du "reingenering" afin de réunir les services et économiser dans les frais de gestion. Toutefois, le privé accule le secteur public d'améliorer le pouvoir d'achat des contribuables pour relancer l'économie, en obligeant l'État à se démanteler. Avec un budget commun plus bas, cela veut aussi dire moins de services, et qui aura les moyens de se payer le même service offert par le privé avec son argent de poche? De leur côté, les politiciens sont aveuglés par le discours néo-libéral et pensent qu'il est bon de baisser les impôts des citoyens, de réduire les services publics et de privatiser pour ainsi laisser la population à elle-même dans cette jungle capitaliste. Ce geste va précisément dans le sens d'un démantèlement progressif de l'État avec une diminution de son importance et de son influence. Ces politiciens ne sont pourtant pas des imbéciles! Alors, pourquoi vont-ils consciemment dans le sens d'un suicide éminent de l'État?

 
 
Marcotte, Jean-François. "Le suicide de l'État", Esprit critique, vol.02, no.11, Novembre 2000, consulté sur Internet: http://critique.ovh.org
 
 
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Editorial

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