Esprit critique - Revue électronique de sociologie
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Vol.04 No.04 - Avril 2002
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Numéro thématique - Printemps 2002
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L'intervention sociologique
Sous la direction de Orazio Maria Valastro
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Editorial
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Intervention sociologique ou sociologie d'intervention? Les sociologues chercheurs et praticiens sociaux.
Par Orazio Maria Valastro

Bouleversement... Réflexivité... Intervention... Dans le champ de la recherche sociale

Un bouleversement du rapport sociologue / objet d'étude...

      La théorie et la pratique de la recherche sociale, le rapport entre le sociologue et son propre terrain d'étude, nous révèlent toute une série de réflexions et d'interrogations actuelles, étayant aussi une hypothèse qui se manifeste de plus en plus dans les analyses et les réflexions élaborées dans le champ des sciences humaines et sociales: le ressort d'un processus de re-définition et de transformation du rapport entre le sociologue et son propre terrain d'enquête. Cette hypothèse génère des questions tant au niveau épistémologique que méthodologique.

      Il est singulier et intéressant de nous faire constater le rôle joué par les méthodes qualitatives dans le changement vraisemblable du paradigme de la recherche sociale[1], un bouleversement qui confirme ce processus de transformation nous orientant vers une sociologie réflexive. Une sociologie se connaissant elle-même, consciente et attentive du rapport chercheur - objet d'étude, soucieuse des pratiques des sociologues et des "acteurs" ou des "agents" sociaux, ainsi que de leurs relations, concentrée aussi sur les processus sociaux dans lesquels ces pratiques se définissent et se déploient.

      Nous avons à nous interroger à plusieurs niveaux: au niveau épistémologique, comme théorie de la connaissance, sur le sociologue et son intention, en passant par son projet et ses espoirs; au niveau méthodologique, comme ensemble de procédures et procédés, sur la production de connaissances et l'impossibilité actuelle à postuler une indépendance des instruments conceptuels et des pratiques sociologiques de l'implication du sociologue vis-à-vis du monde social.

... de la capacité réflexive de la sociologie...

      La question du sujet saisie et développée par les analyses d'Alain Touraine focalise une interrogation fondamentale: comment concevoir l'individu ou le groupe social et ses potentialités dans la création, le maintient ou la transformation de sa singularité? Le concept de construction du sujet substitue la notion de société, depuis la sociologie de l'action[2] à celle du sujet[3], révélant le rôle fondamental accordé à l'éthique, souvent subordonnée à la politique.

      Le rôle accordé au sujet, conçu comme élément fondamental d'évaluation des situations et des pratiques par lesquelles la subjectivité devient la capacité de construction de l'existence du sujet, a guidé l'observation de l'action collective des mouvements sociaux et culturels. Esquissant le désir de l'individu de se construire en tant que sujet de sa propre existence, Alain Touraine vient de conférer à la sociologie la nécessité de consolider ses capacités réflexives à propos du thème du sujet.

      Nous allons ainsi avancer, suivant une approche relevant d'une épistémologie intersubjective, découlant de l'action commune, et d'une méthodologie appropriée à la complexité humaine pour en distinguer ses raisons, l'esprit de la vie sociale[4]. Les conséquences sautent aux yeux de tous: considérer la complexité humaine sans détacher le chercheur de la société et des communautés; le chercheur n'est pas figé dans une position supposée neutre avec une démarche d'expert considérée par sa compétence souveraine d'allouer connaissance et savoir; il y a aussi un rapprochement amplifié entre le chercheur et ceux qu'il étudie, envisagé dans l'intersubjectivité, sollicitant le chercheur en tant qu'acteur social qui n'étant pas désintéressé dans la production de concepts et de notions, est enfermé lui-même dans les mailles de plusieurs réseaux sociaux.

... et de l'intervention dans les contextes sociaux.

      Le sociologue est totalement enveloppé par son environnement, la distance rigoureuse et l'abstention à l'écart de toute implication avec son propre objet d'étude ont étés remaniés par ce processus de transformation du champ de la recherche sociale. La pratique de la recherche sociale, la production de connaissances et l'action du sociologue dépassent désormais les oppositions traditionnelles, les dualismes classiques tels que sujet et objet, faits sociaux et représentations sociales, réalité et interprétation. L'action du sociologue, ses analyses globales concernant les situations sociales et la production de connaissances sociologiques, ainsi que l'application pratique de ses connaissances, et une sociologie appliquée à l'intervention dans les contextes sociaux, nous amènent en conséquence à raisonner sur l'intervention sociologique.

      C'est cette problématique qui donne lieu à ce titre de numéro thématique, un titre un peu équivoque par cette évocation éclatante d'un concept notoire, l'intervention sociologique[5], et d'une démarche spécifique, celle du CADIS, le Centre d'analyse et d'intervention sociologiques, constitué par Alain Touraine[6]. Ce même titre n'était pas ambigu quand je l'avais formulé en italien, élaborant le projet éditorial du numéro thématique: il ne faisait pas directement référence au langage de l'actionnalisme, la présentation de l'appel à communication montrait bien d'ailleurs qu'il s'agissait d'autre chose. En revanche, ce passage du registre de la langue italienne au registre de la langue française a mis en évidence une difficulté dans l'emploi de la notion d'intervention sociologique et des systèmes sémantiques de référence.

      Les différents usages et la diffusion de la notion d'intervention vont nous permettre de déterminer les transformations de l'action sociale, tout en montrant d'autres renvois à ceux de la sociologie de l'action dans l'ensemble des sciences humaines et sociales (voir à ce propos l'article d'Yves Couturier dans ce numéro). Ces questionnements amorcent une problématique fort intéressante: penser l'intervention sociologique non pas en fonction d'une méthode particulière mais en tant que notion capable d'interroger nos pratiques professionnelles et la transformation dans l'action sociale, en tant qu'élément constituant du savoir sociologique et enjeu problématique organisant le domaine de la recherche et de la pratique sociologique. Il ne s'agit pas ainsi seulement de considérer nos pratiques professionnelles mais de s'interroger aussi sur l'épistémè sociologique comme facteur instituant dans le champ de la recherche qui nous concerne (voir l'article de Georges Bertin dans ce numéro).

Quelques problématiques dégagées

Du chercheur social et de son champ d'intervention: de l'implication à l'action herméneutique au sein des processus du travail de terrain.

Un renouvellement épistémologique... imbrication et implication du chercheur et de son objet social.

  • L'article de Marie-France Aujard nous permet d'analyser le rapport entre le chercheur et l'objet de son travail, nous conduisant inévitablement à nous interroger sur la fonction et la profession du chercheur en fonction de l'interprétation sociologique, considérant le travail du chercheur social et de l'interprétation sociologique comme une charpente constitutive de la compréhension de la réalité observée. Les options possibles et réalisables dans la démarche du sociologue ont, sans aucun doute, des conséquences dans la manière de se rapporter et de saisir l'objet de son travail. L'interprétation sociologique, façonnée par le langage, remet en cause les définitions et le sens dégagés par la démarche du sociologue - relevant d'un critère subjectif -: la maîtrise de la construction des connaissances à partir du langage et de la mémoire. La division souvent présentée entre observateur et champ d'observation n'est pas un clivage inattaquable mais un rapport dans lequel le chercheur et son objet sont imbriqués et impliqués, montrant ainsi un objet social comme une réalité qui s'interprète elle-même et donne un sens au statut de la recherche et de l'intervention sociale: il n'y a plus de connaissances absolues mais des interprétations plausibles, des interprétations conçues comme possibilités d'une compréhension.

De la fictive dichotomie entre recherche fondamentale et sociologie d'intervention... pour soutenir un principe de responsabilité.

  • L'article d'Arnaud Saint Martin traite de la fonction critique de la sociologie, sa capacité de déconstruction des phénomènes sociaux et de rupture avec les évidences du monde social, entretenues et protégées par les acteurs sociaux. Un questionnement qui n'est pas directement ancré sur des pratiques d'intervention sociale mais soutient un rapport, découlant de la fonction critique de la sociologie, entre théorie et pratique, la logique de la discipline et son applicabilité aux problématiques sociales. La mobilisation du principe de responsabilité introduit ici deux modalités d'intervention sociologique dans le processus de recherche sociale: l'intervention éthique concernant encore une fois le langage, l'action de prendre la parole, et l'intervention pratique ancrée dans la diffusion de connaissances. La "sociologie dérange" et le sociologue ne pourrait pas faire l'économie de cette fonction critique pour assumer un engagement soutenant la condamnation des inégalités sociales.

La relation de l'observateur avec son champ d'intervention... le statut du discours de l'acteur.

  • L'article d'Hugues Draelants s'interroge sur le statut épistémologique accordé à la parole de l'acteur au sein des rapports entre le sociologue et son propre terrain d'enquête. Le sociologue travaillant dans les organisations est confronté à des situations vécues et présentées par ses interlocuteurs au cours de son intervention, tout au long de son observation et de ses entretiens, découlant d'une action sociale organisée. L'analyse d'un construit social, comme c'est le cas pour une organisation, dans laquelle les individus et les groupes réalisent un système d'action caractérisé par une dynamique relationnelle, relève d'une oeuvre perpétuellement en construction entre les dimensions individuelle et collective. Il faut nous interroger en définitive sur la fonction du contexte de l'enquête, sur les éventuels effets occasionnés par l'interaction entre un observateur et des observés, et examiner la nécessité de construire, par ce processus, une identité renouvelée.

Être dans le monde social... avec le monde de la vie... pour un projet de transformation.

  • L'article d'Yves Couturier sur le concept d'intervention en sociologie du travail social et des sciences infirmières, nous fait réfléchir sur le processus de professionnalisation de la sociologie proposant la possibilité de s'accomplir comme sociologie appliquée à l'intervention sociale. Ce processus s'établit conformément aux conditions d'exercice de la pratique professionnelle. Tout projet de modification de la discipline devient ainsi, pour considérer et déployer les connaissances sociologiques permettant des applications dans différentes formes d'interventions sociales, une nécessité praxéologique. La fonction critique de la sociologie et l'engagement de l'intellectuel, en dehors de son cadre universitaire, peuvent ici véritablement se déployer et se confronter avec le monde tout en étant dans le monde, pouvant ainsi se mesurer à des problématiques sociales retrouvant le monde de la vie sans se positionner de l'extérieur par le biais du singulier pouvoir de la discipline scientifique.

  • L'article d'Hervé Drouard autour du débat sur la recherche en travail social et comment faire reconnaître comme une discipline les sciences du travail social en France, amorce un problème pragmatique, celui qui consiste à articuler théorie et pratique et de parvenir à la transformation et l'innovation dans les pratiques professionnelles, soutenant ainsi une recherche sociale et un projet de transformation, rejoignant cette nécessité praxéologique d'être dans le monde.

Analyser les espaces pluriels de la société... évoquer la parole sociale... identifier l'implication du praticien chercheur en recherche - action.

  • L'article de Georges Bertin nous montre comment l'intervention du sociologue met en évidence sa confrontation avec la complexité sociale, sa capacité à analyser les espaces pluriels des communautés avec des approches multiples: une sociologie de la culture capable de saisir les infinies configurations de la vie et découvrir ses formes agissantes et structurantes; les méthodologies de l'analyse institutionnelle cernant des individus ayant fait le projet de se diriger eux-mêmes et de devenir autonomes. Ici la fonction critique de la sociologie vise à permettre, avec sa production de savoirs et de connaissances, une 'catharsis' manifeste dans les projets de développement local: franchir l'autonomie individuelle pour progresser vers la solidarité. Dans ce processus, le sociologue arrive aussi à évoquer la parole sociale sans l'assujettir avec son point de vue, pour en faire une instance toujours placée en contrepoint de l'action.
  • L'entretien avec Georges Bertin sur l'intervention sociologique et le développement local nous montre qu'il n'est pas possible de faire l'économie de l'implication du praticien chercheur en recherche - action. Les problématiques soulevées par l'intervention sociale à l'intérieur des divers modèles de la programmation sociale, issues de la connaissance sociologique et évoluant en tant que modèles opérationnels, doivent nécessairement prendre en considération les acteurs sociaux impliqués dans ce même processus, dans le cadre d'une complexité sociale qui les détermine et à partir de laquelle découle aussi leur action sociale. Les conditionnements pesant sur l'intervention sociologique, les filtres linguistiques et culturels mis en oeuvre par les acteurs sociaux, signalent l'importance d'un travail d'herméneutique des processus du travail de terrain de l'intervention sociale.

Une sociologie d'intervention autour de processus de construction et d'ancrage de la communication et des rapports entre les acteurs dans leurs contextes sociaux.

  • L'article d'Orazio Maria Valastro attribue au sujet et à la subjectivité un rôle central dans le processus d'évolution des sciences sociales, stimulant la nécessité d'affirmer la capacité réflexive et la fonction critique du sujet, au sein même des sciences humaines, mettant à jour un acteur social en tant que sujet agençant ses expériences sociales et les actualisant dans l'interaction avec le chercheur, le praticien et l'intervenant sociologue. La recherche - action démocratise le processus de production de connaissances structurées et soutient le changement social, tout en situant l'individu dans le territoire au niveau local, avec ses liens et ses responsabilités vis-à-vis de la communauté.

Le métier du sociologue... intervenant sociologue... accompagnateur du changement... consultant: une double tension déontologique... accompagner les acteurs sociaux dans le changement et sauvegarder une attention critique sur la pertinence des outils de justification stimulés.

L'intervention hors cadre universitaire... entre savoirs relevant de la théorie... de la méthodologie... et de l'expérience des professionnels de l'action sociale et des problématiques individuelles et collectives.

  • L'article de Marc Le Gallo se penche sur l'intervention du sociologue hors cadre universitaire et les espaces des relations en jeu dans cette situation, particulièrement pour les professionnels du secteur social. Pour comprendre certaines situations relationnelles à l'oeuvre lors de l'intervention du sociologue consultant, nous sommes amenés à considérer le complexe rapport de celui-ci avec un modèle académique de la pratique sociologique: d'une part l'attachement à ce modèle et d'autre part un sentiment de disqualification alimenté par la mise à distance par ce même modèle des pratiques sociologiques hors cadre universitaire. La profession et la pratique sociologiques ne peuvent pas faire l'économie des savoirs et des références théoriques et méthodologiques, et l'expérience directe du social par les professionnels nous montre aussi la portée fondamentale d'autres ressources: les savoirs et les pratiques concrets résultant directement de l'action des professionnels auprès des acteurs de l'action sociale et des problématiques individuelles et collectives reliées à ces acteurs.

Le sociologue consultant en management dans l'orientation du changement organisationnel... accompagner les acteurs dans la conduite du changement.

  • L'article de Rabah Kechad focalise l'attention sur la sociologie des organisations présentant le sociologue comme un consultant en management confronté à la dimension humaine, une variable difficile à maîtriser dans l'orientation du changement organisationnel et managérial et l'administration des organisations. Le sociologue consultant assume dans ce contexte une double fonction qui consiste, d'une part à analyser les organisations et situer l'intervention dans la dynamique organisationnelle, et d'autre part à soutenir la mise en place d'une nouvelle forme d'organisation et de management, repérant les résistances au changement pour les détourner ou les réduire. Le sociologue consultant assume ainsi une fonction délicate, celle de saisir et d'interpréter la demande de ses commanditaires, et d'accompagner les acteurs dans la conduite du changement organisationnel et managérial.

Un sociologue de terrain... gérant les tensions déclenchées par la distanciation et l'empathie du chercheur... s'interrogeant sur les logiques d'actions et favorisant des décisions opérationnelles.

  • L'article de Philippe Scieur nous propose une analyse du processus de recherche au sein des petites et moyennes entreprises familiales, présentant l'intervention sociologique réalisée dans ces entreprises par sa capacité à produire des savoirs. Une autre finalité de la méthode de l'intervention sociologique appliquée aux entreprises est ainsi de produire des changements au sein des organisations, considérant et comparant les dénouements du processus de changement, selon les transformations organisationnelles sollicitées. Une sociologie de terrain questionnant des pratiques confrontées à une gestion difficile entre distanciation et empathie du chercheur, établit le métier de sociologue dans l'apprentissage de la gestion médiatrice de ces tensions, introduisant une approche inductive pour saisir la construction en acte du système organisationnel par les acteurs. L'intervenant participe aussi de cette construction: son rôle est de pénétrer et saisir les logiques d'action distinctives de chaque entreprise, de s'interroger sur ses pratiques et de favoriser des décisions opérationnelles.

La construction et le développement d'une profession... située entre ses commanditaires et son champ d'intervention... produisant une légitimité politique, sociale et économique.

  • L'article d'Aurelia Manzi renvoie à l'usage d'un savoir sociologique, un savoir institutionnel et universitaire, approprié par un professionnel, le sociologue intervenant, plongé dans la construction et le développement de sa profession à l'intérieur d'une spécialité, traduisant ainsi ses capacités et ses compétences pour arriver à adopter une distance critique par rapport à l'objet de son étude, généralement circonscrit aux conditions temporelles et financières de ses commanditaires. Le sociologue intervenant a la possibilité de se doter d'une grille de lecture de la réalité sociale, convoitée par ses commanditaires, et d'étudier son terrain d'intervention, de l'analyser, de l'interpréter et l'interroger pour ses commanditaires. Situé dans ce lien entre son terrain et ses commanditaires, il se confronte à une dynamique collective placée en interaction avec son objet d'intervention, concourant aux changements des situations examinées. La production de connaissances et l'accompagnement des acteurs dans le changement sont ainsi soumis à certains critères de légitimation, une évaluation souvent détenue par les acteurs intéressés par son intervention; les critères d'évaluation sont alors désignés par des préoccupations d'ordre politique, social et économique, manifestant ainsi les intérêts et les enjeux des acteurs impliqués dans l'intervention.

L'intervention sociologique produit des outils de justifications... stratégies et planifications de programmes d'actions... dont les commanditaires vont s'accommoder... sans une analyse critique de la pertinence des indicateurs.

  • L'article d'Yves Garenne interroge l'intervention sociologique dans le développement durable, un domaine avec lequel se confrontent considérablement les valeurs axiologiques de l'intervenant. Le rôle d'accompagnateur du changement est ici un enjeu central de l'intervention, tout en produisant des outils de justification de la stratégie à adopter ou de la planification de programmes d'actions. Les commanditaires qui vont s'accommoder de ses instruments d'expertise peuvent pervertir aussi l'intervention du sociologue: des exemples fort pertinents nous sont présentés, confondre évaluations et objectifs, pas d'hypothèses à vérifier mais des indicateurs à mesurer. Une attention critique pour ces indicateurs sollicite une analyse critique de la part du sociologue de la pertinence des indicateurs.

Éducation et socialisation: rapport au savoir... expériences individuelles et collectives... une sociologie d'intervention promouvant le développement de la personnalité.

L'intervention éducative comme méthodologie pour comprendre l'expérience des sujets en formation... et s'interroger sur la construction du savoir au sein de rapports sociaux.

  • L'article d'Yves Lenoir, François Larose, Colette Deaudelin, Jean-Claude Kalubi et Gérard-Raymond Roy, considère le rapport au savoir avant tout comme un rapport social. Les sujets inscrits dans cette relation avec le monde social deviennent les auteurs d'un savoir intériorisé et déterminé, un savoir qui est en même temps l'aboutissement d'un processus d'évaluation de leur existence, une activité de représentation du réel. La relation entre l'expérience individuelle et collective du monde qui fonde la connaissance implique l'existence de multiples représentations du réel, des constructions de la réalité et de l'apprentissage au sein de rapports sociaux. L'interaction sociale et la médiation d'instances différentes prenant la forme d'un rapport à soi, au monde et au savoir qui est par essence un construit social révèle ainsi des sujets avec leurs trajectoires sociales en formation entre temporalité et construction de leur identité et de leur rapport au social et au savoir.

L'autobiographie comme méthode dans le champ de l'éducation et de la formation... soutenir et renforcer l'identité des individus... comprendre la phénoménologie de l'expérience humaine.

  • Le compte rendu du texte de Duccio Demetrio nous renseigne sur l'autobiographie envisagée comme une méthode dans le champ de l'éducation, la formation de l'individu et ses capacités comme instrument pouvant nous aider à examiner et ordonner notre vécu individuel et social avec des procédures pouvant ainsi solliciter et renforcer l'identité des individus. L'approche biographique en sociologie nous a permis aussi de recueillir et produire des connaissances sur des phénomènes sociaux et des expériences sociales, nous aidant à comprendre la phénoménologie de l'expérience humaine: comment les individus évoquent leur expérience et leurs pratiques sociales tandis qu'ils réfléchissent sur eux-mêmes et leur vécu; comment s'organisent dans leurs histoires de vie les processus mentaux, émotionnels et sociaux mis en jeu. L'approche biographique en sociologie - l'étude de l'individu et des groupes sociaux - peut rendre compte des événements sociaux et la recherche sociale s'intéresse ainsi aux significations et aux images de soi, produites par les individus et analysées dans le cadre des processus culturels. Une sociologie d'intervention orientée à promouvoir le changement peut apprécier cet instrument et ses capacités à solliciter de nouveaux comportements nécessitant un développement de la personnalité.


Orazio Maria Valastro
Notes:
1.- Melucci A. (dir.), Verso una sociologia riflessiva: ricerca qualitativa e cultura (Vers une sociologie réflexive: recherche qualitative et culture), Bologna, Il Mulino, 1998.
2.- Touraine A., Sociologie de l'action, Paris, Editions du Seuil, 1965.
3.- Khosrokhavar F. et Touraine A., La recherche de soi: dialogue sur le sujet, Paris, Fayard, 2000.
4.- Réseau Culture, Atelier Nord-Sud de méthodologie en analyse, http://www.globenet.org/horizon-local/cultures/Atelier_Nord-Sud_de_methodologie_en_analyse.htm, Bruxelles, 1997.
5.- Touraine A., La voix et le regard, Paris, Editions du Seuil, 1978.
6.- CADIS, La méthode d'intervention sociologique, Paris, EHESS, 1982.
Notice:
Valastro, Orazio Maria. "Intervention sociologique ou sociologie d'intervention? Les sociologues chercheurs et praticiens sociaux.", Esprit critique, vol.04 no.04, Avril 2002, consulté sur Internet: http://www.espritcritique.org
 
 
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