Esprit critique - Revue internationale de sociologie et de sciences sociales
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Automne 2003 - Vol.05, No.04
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Dossier thématique
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Article
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Les performances du divin sur Internet: Us et abus de l'universalisation du culte des orixas
Par Sylvie Chiousse

Résumé:
L'article se propose de présenter les nouveaux usages que permettent les NTIC et en particulier Internet dans l'utilisation qui est faite des divinités yoruba: les orixas. Si les sites et communautés créés peuvent générer une meilleure connaissance et information d'un culte plutôt intimiste jusqu'à présent, et donc en permettre une meilleure reconnaissance, il semble aussi que la tendance à l'universalisme qui s'opère puisse également en faire un simple bien de consommation courante, avec ses heurs et ses malheurs, tendant à dénaturer, désenchanter, voire discréditer ce culte traditionnel. Par la description et la comparaison des éléments trouvés sur les orixas, l'article tentera de saisir les avantages et inconvénients de ces nouveaux usages du divin par internet.

Auteur:
Docteur en sociologie et anthropologie, EHESS Paris. Mène des travaux depuis quelques années sur les relations formation-emploi, l'insertion sociale et professionnelle des jeunes, l'apprentissage des adultes. Dernière production significative sur ce thème: Chiousse S. (2001) Pédagogie et apprentissage des adultes - An 2001... État des lieux et recommandations - Rapport pour L'examen thématique de l'apprentissage des adultes, OCDE, Paris (www.oecd.org/els/education/reviews/).


          Le culte des orixas, hérité de l'empire d'Abomey[1], est une religion initiatique, de tradition orale qui, suivant les diasporas des périodes de traite négrière, s'est en quelque sorte re-créée dans plusieurs régions hors d'Afrique. Quelques unes des pratiques, des divinités, des rituels ont disparu en traversant les océans pour aller s'échouer dans les Caraïbes, en Amérique du nord et en Amérique du sud. Se jouant d'un syncrétisme afro-catholique, d'autres pratiques ont été adaptées au nouvel environnement des terres d'accueil des esclaves africains et, sous une même croyance, ont pris des noms divers: Santeria ou Lukumi à Cuba, Vaudou en Haïti ou encore Candomblé ou Macumba au Brésil[2].

          Longtemps réprimé et initialement pratiqué par les seuls noirs pauvres, ce culte devient presque aujourd'hui une "religion de masse" et ses "divinités de contrebande" (Augras, 1992) se font, de plus en plus connaître, reconnaître, voire aduler et adorer à travers le monde, par l'intermédiaire notamment d'internet.

          A travers la description et l'analyse des éléments trouvés sur différents serveurs à partir du mot-clé "Orisha" ou "Orixa"[3], l'article tentera, après avoir sommairement évalué le public destinataire des informations et services offerts, de faire le point sur ce que pourraient être les bienfaits et méfaits d'internet sur le culte des orixas.

1. A la rencontre des orixas sur Internet

          Voila maintenant des lustres que l'on parle d'une tendance généralisée de "retour vers le religieux" (Bertrand, 1986) ou de nouvelles formes de religiosité qui, sans aller forcément de pair avec une véritable quête existentielle et spirituelle pousse néanmoins un grand nombre d'individus à s'intéresser d'un peu plus près à la religion - ou plutôt aux religions. Les nouvelles technologies de l'information et de la communication sont alors un outil facilitant la curiosité et favorisant la connaissance de certains cultes et pratiques plus éloignés de notre ethos - et le culte des orixas n'y échappe pas.

          Bien que n'étant à peu près toléré que depuis un demi-siècle (au moins au Brésil) et plus particulièrement valorisé depuis les années 1970-1980, la présentation des orixas et de leur culte ont fait une entrée remarquable sur la toile. Dans les années 1997-1998, il y avait déjà près de 700 sites répertoriés (voir Chiousse, 1998). Moins de cinq ans après, une recherche sur Google nous propose pas moins de 17600 sites au mot clé "Orisha", 9630 à "Orixa" et 7360 à "Orisa" (orthographe yoruba). Si l'on ne peut éviter une certaine redondance dans les propositions de sites à visiter et si certains utilisent ce terme hors de toute référence religieuse semble-t-il[4], il n'en reste pas moins vrai que les orixas - en tant que 'divinités' - sont abordés dans un nombre croissant de sites, et les offres uniques, pour satisfaire les curieux comme les avertis, doivent avoisiner au moins les 10000 sites.

1.1. Les navigateurs qui surfent sur les rives des Orixas

          Malgré une augmentation des ventes d'ordinateurs dans de nombreux pays, un essor fulgurant des offres de connexion et de facilitations d'accès, l'ordinateur et l'accès à Netscape ne sont pas encore totalement un bien de consommation courante pour tous et restent, socialement parlant, encore assez marqués. Néanmoins, on note une certaine tendance à la démocratisation de cet usage et les mises à disposition publiques (cybercafés, etc.) donnent de plus en plus de moyens à quiconque de se connecter régulièrement, à défaut d'être propriétaire des outils nécessaires à ces nouvelles technologies.

          Cette tendance à l'homogénéisation (relative) des populations praticantes d'internet, rend difficile la tentative de réalisation d'un "portrait-robot" du navigateur en quête de religion qui va accoster sur un des serveurs spécifiques dédiés aux orixas. On peut considérer, sommairement dit, trois grands types de navigateurs:

  • l'initié - ou tout simplement l'avisé - qui connaît sa route et sait exactement ce qu'il cherche et veut trouver sur le site des orixas sur lequel il se connecte- en termes d'informations et/ou de services;

  • l'apprenti-sorcier - qui sait à peu près de quoi il s'agit et cherche au moins un ajout d'informations, voire des possibilités de services;

  • le touriste - qui, au hasard de ses navigations, aura dérivé vers l'inconnu et va donc découvrir ce qu'il est donné à voir sur Internet de la religion des orixas.

          Il apparaît ainsi trois personnages aux visages et aux attentes bien différents et pour lesquels la découverte des sites n'aura pas les mêmes incidences - selon les pourvoyeurs d'informations et selon les éléments d'information et de connaissance donnés sur ces sites.

1.2. Les pourvoyeurs d'informations et de services sur les orixas

          Les principaux repaires des pourvoyeurs de ces sites se trouvent en Amérique du nord - Seattle, Chicago, New York, Houston, Los Angeles - puis à Détroit, Oakland, Cuba, Haïti, au Brésil, en Afrique, - et depuis très récemment aussi en Australie. Les sites européens sont trop rares pour être significatifs dans ce domaine des cultes aux orixas.

          Étonnamment, ce n'est pas là où le culte est le mieux implanté (Brésil, Cuba, etc.) qu'il y a le plus grand nombre de sites. De même, il y a une grande divergence dans la nature des informations données et dans la présentation de celles-ci. On reconnaît au moins trois présentations possibles de la religion des orixas, avec des jeux conatifs fort dissemblables:

  • l'un s'amuse de mystères et nous emplit l'écran d'une nuit étoilée (voir par exemple http://www.seanet.com/~efunmoyiwa/welcome.html) ou de signes plus ou moins cabalistiques en rouge et noir, qui, s'ils n'ont pas forcément vocation à nous effrayer, nous laissent cependant imaginer que l'on entre dans quelque chose de peu 'catholique'...,

  • un autre joue plus sur le sérieux, voire l'aspect scientifique des informations transmises et nous noie dans un torrent de données pointues et termes yorubas - sachant que bien peu nombreux seront les navigateurs qui sauront sans coup férir les déchiffrer.

          Quelles que soient nos connaissances dans ces domaines, il s'agit toujours plus ou moins d'un plongeon dans l'inconnu - mystique ou linguistico-traditionnel - qui semble vouloir faire oeuvre de légitimation des informations données et services offerts compte tenu de ces compétences mises en valeur - et qui nous font défaut!

- la troisième présentation, sans être forcément plus sobre, est plus informative - dans le sens pratique -: une photographie du lieu de culte, les coordonnées, des entrées sur l'historique du lieu, sur le chef du culte, sa biographie et ses ancêtres, sur la connaissance des divinités et pratiques, sur les événements prévus et sur des activités particulières (c'est sous cette troisième présentation que l'on retrouve la plupart des sites des lieux de culte[5]).

          Un certain engouement semble avoir pris, la grande affluence des sites abordant les orixas en est la preuve. Quelques uns vont jusqu'à dédier un site à ces divinités - tout en reconnaissant par ailleurs ne pas être vraiment maîtres de leurs propos. C'est le cas par exemple de Henrick qui écrit: "Òrìsà worship is pretty common in Brasil. It has been somewhat an embarrassement for me, that I knew virtually nothing about it. Now, thanks to good friends I have met over the net, I'm attempting to make a page especially dedicated to the ways of Òrìsà worship in Brasil" (http://www.cd.chalmers.se/~henrick/Orisa/main.html). On doit cependant lui reconnaître un travail sérieux et honnête de mise à plat d'un certain nombre de savoirs et connaissances concernant les orixas et leur culte.

          Tel n'est pas toujours le cas des nombreux sites relatifs aux orixas sur Internet. La section qui suit va s'attacher aux informations et services offerts sur quelques uns de ces sites.

2. Us et abus du divin yoruba sur internet

          De la pratique du culte IRL - "in real life" - à sa pratique ou sa connaissance via internet, on ne peut manquer de noter un certain nombre de différences, voire de distorsions. En outre, ce qui est délaissé voire inconnu dans le culte in real life, apparaît bien souvent ici mis en avant et valorisé.

2.1. Les informations sur les orixas et le culte

          Il est à noter dans la plupart de ces sites un usage massif de la langue yoruba. Tous se targuent de pratiquer - et enseigner parfois aussi - un culte sachant évoluer tout en restant au plus près de la tradition (yoruba s'entend). L'utilisation de cette langue - souvent définie au Brésil comme étant la langue des orixas, la langue du secret - semble alors être la garantie de fidélité au culte traditionnel tel qu'il était pratiqué en terre yoruba. Beaucoup cependant n'en ont plus qu'une connaissance très approximative.

          Outre la langue utilisée, s'agissant d'un culte de tradition orale et jusqu'à présent peu institutionnalisé, il n'est pas rare - IRL - de trouver des différences d'un lieu à l'autre dans les représentations données des orixas et la façon de les honorer au mieux. On s'accorde néanmoins généralement sur un certain nombre de caractéristiques quasi-immuables - dont quelques éléments sont donnés ci-dessous:

          Les orixas ne sont pas à proprement parler des dieux, mais des entités divines, c'est-à-dire des intermédiaires entre Olorun (le dieu unique, suprême et créateur) et les hommes et ils sont considérés, pour reprendre la formule de Boyer-Araujo (1993) comme "des protecteurs dispensateurs de bienfaits terrestres". Ils ont une existence anthropomorphe, connaissent parfois le péché et l'adultère[6] et se caractérisent par une couleur, des attributs; ils dominent des éléments naturels et des activités humaines particulières.

          C'est ainsi par exemple que Xangô aurait été le quatrième alaafin (roi) de Oyo, divinisé après des combats héroïques pour son peuple et son empire. Il est l'époux de Iansã mais vit une passion fulgurante avec Oxum. Maître du feu et des éclairs, il représente la virilité, porte du rouge; son attribut est une sorte de hâche. Iansã est la divinité des vents et des tempêtes; elle dirige les eguns (les esprits des défunts) et est la seule entité à ne pas craindre et fuir la mort. Oxum est la divinité de la richesse et de la fertilité, elle représente la féminité, la beauté, l'amour charnel; elle est fêté le 30 novembre au Brésil, sa couleur est le jaune et le doré, son attribut est un miroir, et elle règne sur les fleuves, les rivières et les cascades. Oxossi, roi de Ketu, dont l'emblème est un arc et des flèches, porte généralement du vert et se fête le 20 janvier au Brésil[7]. Il est la divinité de la chasse, des fôrets et de tout ce qui y vit. Etc.

Comment ces entités divines apparaissent-elles sur Internet?

          S'il y a un ordre d'arrivée ou de présentation des divinités dans le culte au quotidien, celui-ci est rarement respecté ici. Les descriptions données sont quelquefois erronées, les interprétations sont souvent quelque peu farfelues, frôlent parfois le ridicule. Le site de Wemba en offre un exemple flagrant (voir http://www.wemba-music.org/orisha.htm):

          Les premières lignes d'introduction nous apprennent que "wemba means magic" (il s'agirait d'un terme congolais). Wemba se définit comme le site d'un groupe de musiciens, poêtes, danseurs, auteurs qui vit et travaille à New York et s'évertue à sauvegarder la culture des diasporas africaines. La date de création de leur site n'est pas mentionnée (mais heureusement, ils n'ont eu jusqu'à présent que 1303 visiteurs).

          Dans leur présentation, Oxossi (rapidement décrit supra) devient le messager d'Oxala, on le fêterait le 23 avril (jour de St-Georges et de la divinité Ogun) et ses couleurs seraient le bleu et le doré (qui est surtout connu comme étant la couleur d'Oxum). Suivant les régions, Yemanja, qui représente la mer et l'amour maternel, est honorée le 31 décembre ou début février. Cela se passe le 7 septembre pour Wemba.

          Plus amusant, avec une erreur d'appréciation de la langue yoruba, Osun / Oxum, reine de beauté (dans le culte traditionnel) ne marche plus que sur une jambe et ne parle pas; elle devient "une guerrière" aux coté d'ogun et d'oxossi... (les caractéristiques qu'on lui donne sont en fait celle d'Ossãe, orixa maître des herbes et de leurs vertus).

          Quant à Exu, connu comme étant la divinité des carrefours et du début de toute chose, personnage ambigu, capable du meilleur comme du pire, irascible, parfois associé aux voyous (la Pombagira, son équivalent féminin, est associée aux prostituées), il est ici honoré avec de l'eau (alors qu'on lui offre du rhum ou de la cachaça[8]), et, alors qu'il effraie et perturbe la plupart, on nous apprend ici qu'il "aime spécialement les enfants"... de là à imaginer Wemba faire d'Exu le protecteur des pédophiles, le pas pourrait vite être franchi...

          De même, la volonté de coller au plus près des réalités fait d'Obaluaé, divinité des épidémies, le maître incontesté du HIV.

          Naviguant d'un site à l'autre, il semble ainsi difficile pour un néophyte d'avoir une information à peu près 'sûre' ou tout au moins correcte - selon les mythes fondateurs et la tradition - sur les caractéristiques des divinités yoruba.

          Loin de ces troubadours 'ardents défenseurs de la tradition africaine dans les diasporas' (!), les lieux de culte qui se sont donnés les moyens de créer un site internet offrent, pour la plupart, un enseignement de la mythologie yoruba et des descriptions des diverses divinités et pratiques plus conformes à la réalité des enseignements IRL.

          Tous ne se limitent cependant pas à faire connaître le culte, mais 'offrent' également un certain nombre de services.

2.2. Les 'offres' de service de divination

          Comme nous le signalions précédemment, les orixas sont perçus comme étant des 'protecteurs dispensateurs de bienfaits terrestres'. Chaque individu a son orixa protecteur qui lui laisse en empreinte des caractéristiques et un caractère particulier. L'orixa guide l'individu dans sa vie, l'aide à comprendre ce qu'il se passe dans son existence, le 'punit' par son éloignement lorsque celui-ci viole un tabou - ce qui 'explique' assez souvent divers malheurs, dont la maladie - que l'orixa peut aider à aplanir pour peu qu'on l'honore suffisamment.

          C'est essentiellement par la divination - par l'intermédiaire du chef de culte - que l'on peut connaître la parole, les désirs ou conseils et recommandations des orixas.

          Le jogo de buzios[9] est le procédé de divination le plus courant et le plus conforme au culte traditionnel. Il permet de connaître l'orixa protecteur de l'individu et le message de celui-ci. Cette divination qui se réalise dans un face-à-face entre l'individu demandeur et le chef de culte semble désormais pouvoir s'opèrer au travers d'un écran d'ordinateur, dans la plus totale virtualité.

          S'il n'est pas sûr, évacuant le stress et la moiteur du face-à-face avec celui qui communique avec le divin, que ce nouveau procédé soit aussi émouvant que celui in real life, il apparaît aussi et surtout que le chef de culte qui traduit les messages des cauris, est censé traduire également et interpréter[10] - dans le face-à-face - le comportement de l'individu demandeur. Reconnaître alors une valeur au jogo de buzios par internet, consiste à reconnaître que ce qui ne se perçoit ordinairement que par le contact humain, devient désormais possible par l'intermédiaire de l'écran d'ordinateur, ce dernier laissant aussi bien passer les émotions des échanges.

          C'est ainsi que baba Eyiogbe (du site orisha.net - www.seanet.com/~efybliyuwa/welcome.html) explique que ces "consultas" (consultations) par internet "ne sont pas très bien" - il donne cependant ses coordonnées électroniques et annonce un tarif de$160 pour connaître son orixa...

          Le candomblé Ilê filhos do fogo (http://paginas.terra.com.br/religiao/filhosdofogo) annonce quant à lui: "jogamos buzios gratuitamente por telefone todas as segundas, quarta, quinta feiras das 13 até 17 horas" (nous procédons aux divinations par les cauris gratuitement par téléphone tous les lundi, mercredi et jeudi de 13 à 17h). Ils se refusent cependant à des consultations plus poussées par téléphone et vous aurez noté que ce type de consultation ici est gratuit; le culte du candomblé fonctionnant encore ordinairement sur le système de la gratuité ou du don et contre-don défini par Mauss[11].

          Outre la divination par le jogo de buzios, les sites dédiés aux orixas sur Internet semblent mettre en avant des systèmes de divination réprouvés par les cultes traditionnels - IRL. Ce qui fait parfois la une des journaux à sensation au Brésil, apparaît avec une connotation très péjorative, étant taxé de charlatisme par exemple - est ici largement mis en valeur, comme c'est le cas pour les prédictions à l'année au niveau national, voire mondial[12]. C'est ainsi que ce même site Orisha.net, sous le couvert de Ifa, orixa de la divination, annonçait ses prédictions pour 2002: de terribles maladies sur terre, des coups d'État, des vols, des accidents maritimes et une recrudescence de cas de leucémie... Ces prédictions s'accompagnent de recommandations particulières, comme celles de ne pas manger de nourriture avariée, de ne pas laisser les enfants se baigner sans surveillance, ou encore de repeindre sa maison en blanc... Il n'est guère nécessaire de se lancer dans un commentaire de ces banalités, sauf à considérer que ce n'est peut-être pas le meilleur moyen de donner une image valorisante d'un culte religieux.

          Enfin, en dehors de ces pratiques existantes dans le culte in real life, approuvées ou réprouvées, il en est d'autres qui semblent s'être créées spécifiquement sur la toile.

          C'est ainsi qu'un site cubain de Santeria, associe les divinités du panthéon yoruba aux signes du zodiaque et publie dans ses pages un horoscope hebdomadaire en fonction, non de son mois de naissance mais de son orixa protecteur (voir: http://horoscope.cubasi.cu/santero/semanal.asp?santero=2etidioma=es[13]. Le seul gros avantage peut-être de cet horoscope est qu'il est gratuit et que, du coup, s'il n'apporte pas de solution miracle, au moins il n'est pas financièrement abusif.

          Enfin, une dernière innovation sur l'utilisation des orixas par internet, hors de toute procédure 'légale' dans les cultes traditionnels: le tarot. Parmi tous les lieux de culte fréquentés et étudiés au Brésil, cette pratique n'a jamais été observée ni même mentionnée par quiconque. Sur le Net, elle occupe pourtant de nombreux sites et listes de discussion. Le groupe Yahoo (http://groups.yahoo.com/group/ASHE-DE-ORISHA/messages/1?viscount=100) compte pas moins de 4 600 messages depuis l'an 2000. Les personnes qui intègrent cette liste ont entre 20 et 40 ans, essentiellement des femmes, et annoncent généralement "s'y connaître un peu en sorcellerie" (?!!). Il semble nécessaire de noter ici, à la suite de nombreux chercheurs ayant travaillé sur le candomblé, la macumba, la santeria, etc. que le culte des orixas est, pour tous, très éloigné de la sorcellerie ou de la magie noire. Bastide parle tout au plus d'une "religion magique" dans le sens d'une "religion pratique"[14]. Le principal correspondant se fait appeler "Oshuniyi Odo Femi", souhaite la bienvenue, propose force et salue en yoruba (avec des fautes), met entre trois et cinq mois à répondre à la première demande, puis, lorsqu'il se décide à donner suite au demandeur, envoie deux ou trois mails à quelques minutes d'intervalles. Après ces premiers échanges, les communications sont moins espacées. Le demandeur est censé donner sa date de naissance et poser une question qui lui tient à coeur. A partir de là, Oshuniyi Odo Femi"interpelle les orixas", tire trois cartes de tarot représentant les orixas (gratuitement et "de bon coeur"), interprète et conseille:

"I see that problems seem to follow you were ever you go, the worst thing you can do is ignore your problems, wich you tend to do. Also, I see that you seem to judge people and situations, by your past experiences, you seem to always be on gard... You are a great romantic searching for love, This is what I see that you have lost, a Lover or a companion, or you just do not have it in your life...

I am going to give you an ebbo [sacrifice, obligation] for Oshun.. Our Lady of Charity. (...) Make an omllet, and after it is done pour honey on top of it.. Give her pastries, and sweets, she loves that, and will give you blessings. Warning.. Make sure you taste the honey befor offering it to her. Pray to Oshun, and be sincerear, you can recite a prayer, but often times it is good just to say what is deep in your heart. Bring Oshun's offerings to the nearest river and where the water runns rampid, leave 5 copper colered pennies, and an ounce of perfume. Thank her with deep faith. Turn your back and do not look behind you, have faith because it will be in the hands of the Orisha..."

et voila comment, avec une (bonne) omelette, quelques bonbons, etc. on peut retrouver l'amour de sa vie... d'après Oshuniyi Odo Femi[15].

3. Méfaits ou bienfaits pour le culte traditionnel des orixas?

          De ce rapide tour d'horizon sur les rives d'Internet, que pouvons-nous conclure sur les orixás et le culte qui leur est voué, sur les différences et les apports nouveaux entre le culte traditionnel in real life et les pratiques ou informations du Net sur les orixas?

          On ne peut reconnaître un continuum, une valeur épistémique à cette présentation des orixás et de leur religion sur Internet; ce qui se passe ou est mis en avant in real life n'apparaît plus aussi probant sur la toile; ce qui est réprouvé in real life est souvent valorisé sur la toile. S'il existe partout et dans chaque système de la réalité sociale, des pratiques plus ou moins douteuses ou hasardeuses, elles semblent ici, souvent, pouvoir faire leur miel.

          Si cette présence sur Internet nous permet, pour le moins, d'évaluer le caractère évolutif, spatial et temporel, de la religion des orixás, il est bien évident que l'intérêt premier de la création de tels sites est beaucoup moins tourné vers l'aspect scientifique ou spirituel que du côté d'un certain prosélytisme et raccolage religieux - qui ne suit plus toujours les traditions ancestrales et dont les innovations peuvent ne pas apporter de 'réels' bénéfices au culte IRL.

3.1. Un bien de consommation courante - entre information cultuelle et raccolage abusif

          L'utilisation abusive de la crédulité de quelques âmes en peine a toujours existé; les charlatans les plus expérimentés trouvant toujours un bon filon à exploiter. Internet en offre ici une opportunité exemplaire.

          L'utilisation de la langue yoruba apparaît comme un modèle de traditionnalité et de respect du culte originel, et même si la légitimation par le linguistique peut conduire à quelques débordements ou erreurs, bien rares sont ceux capables d'en prendre note(en dehors des zones du Nigeria - Togo - Bénin où le yoruba reste la langue officielle à côté du français ou de l'anglais, il y a peu d'enseignements de cette langue, même en terre d'origine). Passé donc ce "gage de sérieux", tout est possible, tout est permis.

          Alors que les pratiques de divination se réalisent ordinairement dans le huis-clos d'un face-à-face entre le demandeur et le chef de culte qui observe et analyse le comportement de celui qui vient faire appel aux orixas[16], tout semble pouvoir se passer aujourd'hui de ce petit quelque chose d'humain, indispensable à la bonne connaissance de l'autre.

          Pour un sympathisant de ces cultes comme pour celui que nous avons qualifié de "touriste", l'aspect interactif de Netscape ne doit pas être négligé - et les échanges frôlent parfois le ridicule ou peuvent mener à des excès en tous genres. Sur le serveur de l'Ifa Foundation of North America, il est possible de raconter nos petits problèmes, nos grandes préoccupations, le "shaman" Fagbamila - alias Philip Neimark - nous donne, en toute bonne foi, quelques conseils: "my shamanic instincts suggest (...) let your life, not your instructions, be the beacon for truth...". Vous n'avez pas le temps d'accomplir vos obligations aux orixás? Où que vous soyez dans le monde, Baba Ifa Karade du Temple Ilé Tawo Lona (littéralement, celui qui a le secret dans son chemin?) s'en charge pour vous: deux "services" par mois pour$30.00 (mensuels aussi).

          Alors que le culte traditionnel se réalise essentiellement sur le système du don et contre-don, sur le Net, tout s'achète et se paie - comme nous avons pu le noter pour les consultas - et les tarifs sont affichés, identiques pour tous et élevés - ce qui s'éloigne grandement de la règle habituelle des cultes IRL.

          Tout se vend aussi et le babalorixa Fernando Oliveira Perna qui "offre une religion sans mystères au service du peuple" nous propose - pour la modique somme de R$6.00 - de "laver notre aura" avec son "shampoing ésotérique" (http://www4.sul.com.br/orixa/shampoo.html).

          Les invites commerciales et le raccolage religieux s'accompagnent aussi d'un prosélytisme politique. Aux élections qui ont fait le succès de Collor au Brésil, peu avant les années 90, de nombreux chefs de culte avaient pris parti[17] et incitaient leurs fidèles à les suivre. Le site d'Eleda indiquait en gros caractères rouges à l'entrée de son site: "Eleda.org supports Ernesto Pichado's candidacy for Hialeah city Council"... L'impact dépasse évidemment largement la seule population d'un terreiro.

          Il ne faut cependant pas voir que des effets négatifs dans cette inscription des orixas, de leur culte et de leurs pratiques sur la toile. Un des objectifs de ces sites peut être l'intérêt de la découverte d'un autre culte, d'une autre culture, le recueil et le partage d'informations concernant la religion des orixás et une meilleure connaissance des individus garants de cette culture.

3.2. Une reconnaissance au-delà des frontières

          Pour avoir été longtemps réprimé et méconnu, le culte des orixas - en passant sur le mode écrit - connaît aujourd'hui une sorte de renaissance et de revalorisation de son culte, de ses pratiques, des activités de ses membres.

          Le passage à l'écriture d'un culte de tradition orale permet à de nombreuses sources de se rassembler pour tenter d'harmoniser les connaissances, d'aller plus loin dans la compréhension de la cohérence de ces systèmes qui ont traversé les âges et les frontières.

          Mais l'inscription sur le Net est également porteur d'un autre type de bénéfices qui sort cette fois du cadre strictement religieux de ce culte. Au Brésil, la plupart des terreiros se trouvent dans les quartiers défavorisés de la ville (les favelas), repaires de quelques bandits plus ou moins notoires et véritable ghetto que ni la police ni les pouvoirs publics n'osent plus pénétrer, bref un no man's land oublié de tout secours et de toute aide locale, régionale ou nationale. Pourtant, des solidarités se créent, justement par l'intermédiaire des chefs de culte et la population de ces cultes crée une sorte de communauté d'entraide et de solidarité[18] qui, elle, commence à être connue et reconnue, y compris par les grandes organisations d'aide et de soutien internationales qui commencent à leur apporter leur contribution ou à leur permettre de servir de médiateurs. C'est ainsi que la Comunidade Afonja du terreiro Ilê axé opô Afonja à Salvador do Brasil collabore aux travaux de l'Unicef et participe du projet "Child in danger mobilization" (www.geocities.com/childindanger). D'autres chefs de culte brésiliens par exemple servent également de médiateurs entre les jeunes des favelas et les ONG (Organisations non gouvernementales) en soutenant et participant activement aux programmes internationaux d'éducation à la citoyenneté de l'Unesco (voir www.ibe.unesco.org/international/ICE/bridge/english/citizenship/practices/Brazil).

          Ici donc, Internet permet au culte des orixas d'être connu, reconnu, voire valorisé en tant que religion mais aussi pour ses apports et activités extra-religieuses - et ce système fonctionne en boule de neige ou cercle vertueux: montrant la cohérence de leurs pratiques et la solidarité qu'ils peuvent partager, les chefs de culte bénéficient du soutien des ONG qui leur permettent de faire encore mieux connaître leurs activités.

          Les premières réflexions à tirer sur les performances du divin sur Internet montrent donc quelques médailles et aussi leurs revers: en se faisant mieux connaître, le culte des orixas se fait aussi reconnaître et les garants de ce culte et de cette culture récoltent un soutien plus crédible qu'ils n'ont jamais eu, allant jusqu'à bénéficier d'aides internationales permettant à leurs populations d'accéder à des biens qui vont au-delà du religieux. En même temps, la médaille a son revers et le culte traditionnel se voit souvent galvaudé par quelques charlatans dont la quête est bien moins spirituelle qu'en monnaies sonnantes et trébuchantes. Prenant désormais un caractère universel, il est probable qu'il connaisse quelques difficultés à rester, comme le signalait Aubrée (1987, p205) dans le groupe des "religions ayant pour fonction de préserver un patrimoine ethnico-culturel". On ne peut donc manquer d'y voir une certaine banalisation du sacré, la transformation d'un culte en objet de mass média et en bien de consommation, où le retour au religieux n'est plus, comme on l'avait annoncé, la réponse à une recherche de lien social, mais devient un self-service aux pratiques bien éloignées des traditions auxquelles ils disent se référer, et s'individualise au point de se refermer sur un écran d'ordinateur.

Sylvie Chiousse

Notes:
1.- Correspondant aux régions actuelles du Nigeria, Togo, Bénin.
2.- C'est le culte tel qu'il se développe au Brésil que nous avons le plus étudié (voir Chiousse, 1995) et qui nous servira de base de référence dans les propos qui suivent.
3.- Prononcer "oricha" - la première orthographe est anglosaxonne, la seconde lusophone. Les hispanophones et autres utilisent indifféramment l'une ou l'autre orthographe.
4.- Un groupe de "rock espagnol" s'appelle orisha; un chien, qui semble gagner quelques concours, s'appelle Orixa Ogum do Borghetto - (http://www.filabrasileirodogs.com/filas/orixa_ogum_do_borghetto.htm).
5.- Voir par exemple pour le Brésil: http://www.geocities.com/Athens/Acropolis/1322/introvp.html ilé axé opo afonja (Salvador) ou http://www.oxum.com.br/oxum.asp ilé oxum docô (Porto Alegre).
6.- Comme on peut le retrouver dans le panthéon grec ou romain.
7.- Ces dates sont le fruit d'un syncrétisme afro-catholique. Oxossi possédant un arc et des flèches est associé dans la religion catholique à St-Sébastien, représenté adossé contre un arbre, le corps percé de flèche... et fêté le 20 janvier.
8.- Alcool de canne.
9.- Lancer d'un jeu de 16 cauris (coquillages) représentant les 16 principaux orixas. Selon la façon dont tombent les coquillages et le nombre de ceux tombés sur leur face concave ou convexe, le chef de culte indique quel est l'orixa (ou les orixas) qui communique(nt) et la nature du message à transmettre à l'individu.
10.- On reconnaît généralement que le chef de culte est avant tout un fin psychologue (sémoticien?), capable d'analyser, de déceler chez l'individu ce qui le stresse dès la première rencontre. "La connaissance intuitive des êtres humains dont témoignent les babalâo est stupéfiante. Les correspondances entre la connaissance intuitive et le savoir traditionnel d'une part, et les messages divinatoires de l'autre sont étranges et multiples" (Ziegler, 1971). Ces propos sont également largement confirmés par René Ribeiro, professeur d'anthropologie et médecin-psychiatre par ailleurs (voir Ribeiro, 1978, 1982).
11.- Dans les années 1995, des tarifs commençaient parfois à être affichés dans quelques terreiros (lieu de culte au Brésil), pour les consultas. La somme alors demandée est modique, voire symbolique (l'équivalent de $1). Les tarifs ensuite évoluent en fonction de la nature des pratiques mises en oeuvre et de ceux qui les demandent. Voir à ce propos Ziegler (1971): "La yawalorixa représente généralement la seule personne à disposer d'un revenu financier régulier. Elle guérit les pauvres et les riches, mais les riches doivent payer (...). Ceux qui arrivent en limousine (hommes politiques, joueurs célèbres du foot brésilien, officiers supérieurs et parfois des Monseigneurs catholiques) paient pour ceux qui viennent pieds nus. Cependant, elle fuit les oligarchies blanches. Son activité de consultation ne s'insère dans aucun circuit économique global".
12.- Au Brésil, les chefs de culte traditionnels se refusent à ce type de divination et bannissent largement les quelques 'brebis galeuses' qui s'y adonnent à des fins croient-ils promotionnelles pour leur terreiro.
13.- Si l'on est sous la protection d'Oxossi par exemple, on obtient les consignes suivantes (3ème semaine de juillet 2003): "Acéptate más, trabaja la autoestima. Vivirá momentos inolvidables en la intimidad. El miércoles, si puede, llame y hable con su santo protector. Debe ajustarse a una dieta más sana. Su perdición puede venir por la boca. No evite las salidas con amigos, ni con la familia.". Bref, rien de plus que dans les horoscopes de divers magazines presse - sauf à dire peut-être que, dans le culte des orixas, c'est le jeudi et non le mercredi que les fidèles d'Oxossi sont censés l'honorer.
14.- Voir Bastide (1958). Il n'y a pas de paradis, donc pas de salut à attendre d'un improbable au-delà: tout se fait et s'accomplit ici et maintenant - c'est en ce sens qu'il s'agit d'une religion "pratique".
15.- Si le demandeur veut en savoir plus ou aller plus loin, les échanges se font ensuite en privé, hors liste de discussion et il est donc impossible pour nous d'en savoir plus (tarifs et procédures).
16.- Dans quelques cas, la parole de l'orixa peut aussi intervenir, lors d'une cérémonie, par l'intermédiaire d'un initié en transe (incorporant donc une entité divine).
17.- Souvent pour son rival, Lula, devenu président depuis... (dans les années 1930, les lieux de culte ont souvent été perçus comme pouvant être des cellules communistes).
18.- Le culte au Brésil est perçu par beaucoup comme une "société de secours mutuel" (Bastide, 1967).

Références bibliographiques:

Aubrée M. (1987) - "Entre tradition et modernité, les religions" - Les temps modernes, dossier "Brésil", no491, juin.

Augras M. (1992) - Le double et la métamorphose - L'identification mythique dans le candomblé brésilien - ed. Méridiens/Klincksieck, coll. Sociologies au quotidien, Paris.

Bastide R. (1958) - Le candomblé de Bahia - rite Nagô - ed. Mouton et co, Paris.

Bastide R. (1960) - Les religions africaines au Brésil - Vers une sociologie des interpénétrations des civilisations - ed. PUF, Paris.

Bastide R. (1967) - Les Amériques noires - Les civilisations africaines dans le Nouveau Monde - ed. Payot, coll. Petite bibliothèque Payot, Paris.

Bertrand M. (1986) - "Religion, identité et lien social" - Sociétés, no10, vol.2, p14-15.

Boyer-Araujo V. (1993) - Femmes et cultes de possession au Brésil - Les compagnons invisibles - ed. L'Harmattan, coll. Connaissance des hommes, Paris.

Chiousse S. (1995) - Divins thérapeutes - La santé au Brésil revue et corrigée par les Orixas - thèse de doctorat sociologie - anthropologie, EHESS - École des hautes études en sciences sociales, Paris.

Chiousse S. (1998) - "Orixas on line - Les divinités yoruba sur Internet" - Cahiers du Brésil contemporain, no35-36 spécial "Religion", CRBC- EHESS, Paris.

Chiousse S. (1999) - "Le culte afro-brésilien entre universalisme et intimisme" - Sociétés, no64.

Ribeiro R. (1978) - Cultos afro-brasileiros de Recife - Um estudo de ajustamento social - ed. IJNPS - Instituto Joaquim Nabuco de pesquisas sociais, 2a ed, serie Estudos e pesquisas, Recife, PE, Brasil.

Ribeiro R. (1982) - Antropologia da religião e outros estudos - ed. Massangana, IJNPS - Instituto Joaquim Nabuco de pesquisas sociais, Recife, PE, Brasil.

Ziegler J. (1971) - Le pouvoir africain - Éléments pour une sociologie de l'Afrique noire et la diaspora aux Amériques - ed. Seuil, coll. Points, Paris.


Notice:
Chiousse, Sylvie. "Les performances du divin sur Internet: Us et abus de l'universalisation du culte des orixas", Esprit critique, Automne 2003, Vol.05, No.04, ISSN 1705-1045, consulté sur Internet: http://www.espritcritique.org
 
 
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